✿ june & jax

Jax, fraichement débarqué à Lewis, faisait les cent pas dans la magnifique villa qu'il venait de s'offrir. Depuis quelques jours, il était sans doute devenu le dessinateur le plus riche de tout le pays. Un artiste plein aux as qui ne gardait un œil que distrait sur ses dépenses. L'achat de cette maison était une petite folie, mais que voulez-vous ? Ça paye plutôt bien de risquer sa vie tous les jours pour la sécurité d'un pays qui, au final, n'en a pas grand chose à branler. Offrant donc un magnifique bras d'honneur à ses supérieurs qui l'avaient longuement conseillé de faire profil bas et de vivre sa nouvelle vie sans excentricité, Cincinnati s'était offert ce petit plaisir, espérant tromper l'ennui, persuadé que l'exploration de la villa lui prendrait bien toute la matinée. Peine perdue... Puisqu'une heure plus tard il en avait déjà fait deux fois le tour. L'instant d'après, il poussait un petit soupir qui en disait long sur son état d'esprit. Il ne savait ce que Lewis avait à lui offrir, mais de toute évidence, ce serait plutôt restreint. Il en était désormais certain, personne ne viendrait le chercher ici ; sa belle gueule était en sécurité.

Un nouveau soupir plus tard, Jax se retrouva sur le balcon, son calepin dans une main, un crayon dans l'autre. Lewis, commérages mis à part, n'offrait certainement que très peu de distraction. Aucune table de jeu ne devait l'attendre en ville, aucune jeune femme ne devait courir les bars à cette heure matinale et il était hors de question qu'il ressorte son arme pour tirer quelques boîtes de conserve qu'il dénicherait au milieu des bois. Bien heureusement, ce village offrait à ses habitants des paysages magnifiques et, même si ce n'était pas ce qu'il préférait dessiner, cela suffirait certainement à tuer son ennuie grandissante. Déposant délicatement son calepin sur la balustrade, Jax s'accouda contre cette dernière et fouilla l'endroit du regard. Regard qui tomba immédiatement sur une silhouette qui perçait gracieusement l'opacité de la fenêtre de la maison d'en face. Celle-ci retint son attention quelques instants. Quelques courtes secondes pendant lesquelles il se délecta silencieusement de la vue que cette femme à demi-nue lui offrait si gracieusement. De toute évidence, le voisinage serait à son goût... Un rictus perça la morosité de son visage tandis que l'inconnue disparaissait, le privant à nouveau de toute distraction. Nouveau soupir. L'homme, oubliant momentanément la demoiselle, retourna à ses occupations qui, déjà peu attrayantes, se trouvèrent tout à coups dénuées de tout intérêt.

La journée aurait pu se poursuivre ainsi inlassablement si la jolie inconnue n'avait pas si généreusement décidé de l'honorer de sa gracieuse présence...

Jax sursauta alors que la demoiselle, toujours enroulée dans une simple serviette, l'interpellait d'une curieuse manière. Maîtrisant silencieusement les battements de son cœur, Cincinnati posa sur l'inconnue un regard à la fois étonné et amusé. Cette ville était d'une banalité dérangeante. Ses occupants, en revanche, semblaient quelque peu sortir de la norme. Sans vraiment chercher à comprendre la raison qui avait pu pousser cette jeune femme à l'aborder avec une telle agressivité et ignorant même le regard assassin qu'elle lui adressait, Jax afficha un petit sourire presque moqueur et ne se gêna pas une seule seconde pour détailler la demoiselle. Puisqu'elle se pointait si légèrement vêtu, elle ne devait voir aucun inconvénient à ce qu'il en profite pour se rincer l’œil. Bon, d'après ses propos, c'était justement ce qu'elle lui reprochait, mais cela il réussit plutôt facilement à ne pas s'en accommoder.

Toujours accoudé à la balustrade, Jax détaillait sans aucune gêne les courbes prometteuses qu'il devinait très facilement malgré la serviette qui les masquait. Le commun des mortels auraient qualifié cette femme de physiquement baisable. Matis, lui, la qualifierait de physiquement très baisable. Oui oui, la nuance est de taille ! Ayant pris tout son temps pour graver les formes de l'inconnue dans son esprit, l'homme ne chercha pas à comprendre les propos qu'elle lui avait adressé. Peu lui importait la folie d'une femme du moment que sa beauté lui offrait assez de frustration pour égayer toute sa journée. Surplombant la demoiselle, Jax pris à son tour la parole. - Curieuse manière d'accueillir les nouveaux venus, ma jolie. - Bref silence. Haussement d'épaules. Nouveau sourire amusé. D'une main distraite, Matis boutonna sa chemise qui était jusque là restée ouverte et poursuivit sur un ton qui contrastait étrangement avec cette allure de mauvais garçon qu'il affichait presque inconsciemment. Ses propos en revanche, ne transpiraient d'aucune galanterie. - Pervers, je sais pas... Voyeur par contre, c'est très possible. Et j'aurais tendance à croire que ça ne te déplaît pas tant que ça... - L'homme laissa couler un regard sur le corps de la demoiselle, appuyant silencieusement ses propos. D'une voix nonchalante, il ajouta avec un nouveau sourire. - A ta place j'irais enfiler un jean, en matière de perversité, le vent à des années de pratique de plus que moi. - Et, comme pour lui donner raison, une bourrasque tenta d'arracher la serviette de l'inconnue qu'elle tenait d'une main ferme. Bien malheureusement...

✿ june & jax

Jax, depuis toujours, était un homme extrêmement susceptible. Mais il ne perdait le contrôle de ses paroles et de ses actes que lorsque la justesse de ce qu'on lui reprochait frappait sa conscience. Aussi conserva-t-il une sérénité tout à fait apaisante devant l'irruption - pourtant hostile - de la belle inconnue. Bien évidemment, rien n'expliquait les propos tenus par la demoiselle, mais il ne voyait là nulle raison de se braquer devant cette amertume et cette haine évidente qu'elle lui balançait si gentiment à la gueule. Serein donc, l'homme préféra afficher un sourire qui se voulait tant amicale que moqueur et usait de cette aisance qu'il avait à s'exprimer devant la gent féminine. Jax avait le verbe facile et cela, il l'affichait dès que l'occasion de présentait et le prouvait encore et encore sans réussir à s'en lasser.

Le regard toujours mutin, profitant du court instant qui suivi ses propos, Matis détailla une seconde fois la demoiselle qui, sans même être à son avantage dans cette tenue pour le moins pitoyable, offrait un spectacle tout à fait délectable. De toute évidence, si Jax se fiait aux longs cheveux blonds encore humide ondulant avec nonchalance de part et d'autre de son joli visage, la demoiselle sortait de la douche et l'homme se surprit à penser que cette femme devait faire partie des rares exceptions qui, même sans maquillage ni autres artifices, possédait une grâce, une délicatesse et un charme qui ne pouvait laisser aucun homme indifférent. Et lui, bien sûr, n'échappait pas à cette règle. Lui, bien plus que beaucoup d'autres d'ailleurs. Matis aimait les femmes. Il les aimait, les idolâtrait, les courtisait et, plus que tout, leur vouait un profond respect. Bien sûr, cela il le dissimulait souvent derrière une assurance naturelle et des allures de mauvais garçons qui saillaient plutôt bien à son physique pour le moins avantageux. Chaque femme qu'il se plaisait à séduire, savait pourtant à quoi s'en tenir... Son masque tombant souvent à peu prêt au même moment que ses vêtements, à l'instant même ou la plus belle création de Dieu pénétrait ses couvertures.

Les pensées de Cincinnati furent brusquement interrompues tandis que la demoiselle reprenait la parole. Paroles qui, loin d'éclaircir l'esprit du garçon, renfoncèrent encore un peu son incompréhension grandissante. A l'évidence, l'inconnue lui vouait une animosité qu'il était bien incapable de comprendre. Le seul regard qu'il lui avait accordé à travers la fenêtre de sa chambre avait-il suffit à créer un tel ressentiment ? De nouveau silencieux, il respecta sa prise de parole sans l'interrompre, espérant quelques explications... Jouant machinalement avec son crayon de papier, il ne la quitta pas du regard. Entre amusement et crédulité, ses yeux ne trahissaient, eux, aucune hostilité. Il n'existait que deux explications et, dans les deux cas, il n'avait aucune raison de se sentir blessé. Soit, cette demoiselle se méprenait sur son identité et le prenait pour un autre. Soit, elle était tout simplement détraquée et névrosée. Bizarrement, la tenue plutôt légère de la jeune femme aidant, Jax penchait plutôt pour la seconde option (a). Quoiqu'il en soit, il ne prendrait pas cette étrange agressivité pour lui... Une chance pour cette demoiselle d'ailleurs.

Tandis qu'elle parlait, le comportement de l'inconnue changea légèrement. Semblant plus sûre d'elle, Jax entendit même l'amusement perler dans sa voix et, immédiatement, une troisième hypothèse s'insinua dans son esprit : elle se foutait de sa gueule, tout simplement. Une éventualité définitivement éradiquée tandis qu'elle posait enfin la question qui suffit à effacer chaque infime parcelle de doute. Peut-être aurait-elle dû commencer par-là ? Nouveau sourire sur les lèvres de l'homme alors que le crayon s'immobilisait entre ses doigts. Un simple froncement de sourcils plus tard, un rire très discret s'échappait du fond de sa gorge. - Mmh, je crois sincèrement que si nous nous étions déjà rencontré, je m'en souviendrais. Difficile d'oublier un tel visage. - Charmeur le Matis ? Oh, si peu ! Il était ainsi, incapable de retenir ses compliments en présence d'une jolie femme. Une demoiselle de caractère qui plus est ! Et c'est sans se départir une seule seconde de son demi-sourire, qu'il continua sur sa lancée. - Et je peux aussi bien croire qu'un homme t'ai, à un moment ou à un autre, porté un intérêt un peu trop dérangeant. Il y a de quoi. - A l'évidence, Jax était lancé et celles qui le connaissaient savaient à quel point il était difficile de l'arrêter dans ses situations. Cette demoiselle n'échapperait pas à la règle. - En revanche, il faudra m'éclairer sur les agissements de cet individu, je m'en voudrais de faire les mêmes erreurs. - Du Jax tout craché, ou : "comment ne pas y aller par quatre chemins ?".

Un très court instant, l'homme sembla réfléchir et ajouta avec toute la galanterie du monde. - Et puisque la question de mon identité te trouble tant, je m'en vais couper court à tes doutes. Jax Cincinnati, pour te servir. - L'homme posa un regard serein sur la demoiselle, restant accroché à son sublime visage dont le doute semblait décupler le charme.

✿ june & jax

Grandiloquent le Jax ? Peut-être bien... Certains jugeaient même qu'il en faisait souvent un peu trop dès lors qu'il se trouvait en présence féminine. Mais cette dernière semblait n'accorder que peu de crédit à cette empathie dont il faisait preuve, certainement trop occupée à tendre l'oreille devant ce beau-parleur. Beau-parleur, oui... Mais une grande différence existait entre Matis et ses pairs : celui-ci pensait chaque mot qui sortait de sa bouche. Une franchise parfois dérangeante que la plupart des femmes semblaient pourtant apprécier... A très forte raison ! Doux, prévenant et obligeant - sans toutefois perdre cette fierté propre au sexe masculin - auprès des demoiselles. Respectueux et d'une politesse plutôt singulière auprès des femmes d'un âge un peu plus avancé. Non, aucune ne faisait exception, sauf peut-être les quelques exceptions qui s'étaient risquées à faire irruption dans son collimateur. Oui, sauf ces quelques exceptions avec lesquelles il pouvait se comporter en véritable salaud. Enfin peu importait puisque la demoiselle n'entrait pas dans cette dernière catégorie. Du moins, pas encore. Une chance (ou pas ?) que (pour une fois) l'élégant Jax ne se fie pas à sa première impression ; dans le cas contraire, la jolie inconnue aurait immanquablement et gracieusement pris place dans la catégorie des dégénérées et des détraquées.

Monsieur Cincinnati éprouvait un mal fou à conserver un sourire serein. Cette situation l'amusait. Il savait dorénavant que cette jeune femme s'était mépris sur son identité et, pour un homme qui se devait de changer de nom, de vie et éradiquer tous ses souvenirs, l'ironie de la situation lui paraissait des plus agréable. Bien évidemment, si son agresseur ne s'était pas trouvé doté d'un si joli visage, sans doute aurait-il moins apprécier. Mais puisque les hostilités avaient été déclenchées par une si divine créature - qui plus était toujours vêtue d'une simple serviette ! - Matis n'avait vraiment aucune raison de laisser sa susceptibilité prendre le dessus sur sa sérénité. Étrange comme des courbes généreuses et un visage tant angélique que démoniaque savaient dompter une impulsivité plutôt débordante...

La divine inconnue finit par se présenter, accentuant un peu encore l'immense rictus que Jax se plaisait à afficher depuis plusieurs minutes. Ce nom, il l'oublierait difficilement, cela il le savait parfaitement. Sans même la connaître, il savait que la dénommée June faisait partie de ces femmes inoubliables qui, une fois gravé dans vos souvenirs, y restent accrocher comme une huître à son rocher (désolée pour la comparaison x)). Une chance pour ce cher Cincinnati qu'il ne l'ai pas connu avant qu'on lui impose d'oublier tout ce qu'il avait connu jusque-là.

Sans lui laisser le temps de répondre, aussi vite qu'elle était apparue, la jeune Bradford disparue, privant Jax de la vue magnifique qu'elle lui avait offert jusque-là. Laissant échapper un rire très discret, l'homme poussa un petit soupir emprunt de regret en se redressant. Fort de la promesse de la demoiselle, Matis gribouilla machinalement sur son calepin, le regard perdu dans le vide qu'elle avait laissé derrière elle. Quelques minutes qui lui parurent une éternité s'écoulèrent avant que June ne daigne de nouveau pointer le bout de son nez. Cette fois débarrassée du plus simple appareil, la jeune femme offrit à son nouveau voisin un spectacle tout à fait délectable dont il se réjouit en silence. Avec un nouveau sourire, il accueillit cette demoiselle qu'il ne connaissait pas encore. Habillée, les cheveux enfin secs, les traits dénués de toute inquiétude, Jax lui trouva une crédibilité pour le moins exquise. Saveur décuplée lorsqu'elle reprit la parole, chahutant l'homme qui la dominait toujours de quelques mètres. Paroles qui sonnèrent agréablement aux oreilles de Matis, tandis que l'interrogation presque moqueuse de June l'incitait à répondre du tac-au-tac. - Honnête, vraiment ? Tu vas vite en besogne, demoiselle. Qui sait ? Le pire des voyou se cache peut-être derrière un faux nom simplement trouvé en feuilletant les pages d'un Atlas. - Sans même s'en rendre compte, Jax venait d'ouvrir à la jeune femme un monde auquel elle ne devait nullement être confronté. Bien trop occupé à dévisager la magnifique Bradford et, bien plus encore, enthousiaste à l'idée du jeu qui semblait vouloir s'installer entre eux, il divulguait quelques détails - infimes certes - de son passé. Bien sûr, ni l'un ni l'autre ne s'en rendrait compte, mais il lui faudrait être plus prudent à l'avenir.

Du haut de son perchoir, Jax lança un discret clin d’œil à la jeune femme avant de poursuivre sur le même ton. - Entre un moment si tu veux. Fais le tour, je vais t'ouvrir. - Puis, sans même s'assurer qu'elle l'avait bien entendu, il s'empara de son calepin et disparue à son tour, refermant soigneusement la baie vitrée derrière lui. Une volée d'escaliers et deux couloirs plus tard, Jax se retrouva devant la porte d'entrée qu'il ouvrit sans même une once de précipitation, avant de s'effacer, laissant entrer son invitée. Puis, après un simple regard appuyé en direction de la jeune Bradford, il l'abandonna pour offrir au salon l'honneur de sa présence (oui, oui ça va les chevilles (a)). Jax, doux mélange de prévenance et d'indifférence. Par ce désintérêt, il cherchait simplement à éveiller la curiosité de la demoiselle tout en l'invitant implicitement à le suivre.

Une fois dans le salon, Jax se tourna de nouveau vers la jeune femme. Un demi-sourire inlassablement scotché à ses lèvres, il finit par demander tout en lui lançant une discrète œillade amusée. - Alors, dis-moi tout... Que m'a valu un accueil si... Chaleureux ? Je me doute que tu ne réserves pas une telle hospitalité à tous les nouveaux venus. - Nouveau sourire tandis qu'il ajoutait d'une voix moqueuse. - Fais-moi plaisir, dis-moi que je suis une exception et que tu m'as fait une fleur. - Pas une seule seconde Jax ne chercha à dissimuler que June lui plaisait. A ses yeux, l'attirance qu'il pouvait éprouver envers une jolie femme n'avait vraiment rien de honteux et il l'assumait parfaitement.

Changeant un court instant de sujet, Jax s'approcha de ce qui ressemblait à un bar et demanda, toujours avec cette même courtoisie. - Je te sers quelque chose à boire ? - Puis, après une moue boudeuse, il se ravisa. - Sauf que j'ai rien à t'offrir, donc ce sera pour une autre fois... Question savoir-vivre, on a tous les deux des progrès à faire. -