« - De ce que je sais de ce gamin, c'est ce que c'est une vraie tête de mule. Mais dans le genre, je n'ai jamais connu pire ! A l'époque, j'étais le nouveau compagnon de sa mère, et il ne m'a jamais apprécié, il n'a fait aucun effort pour qu'on s'entende, à mon contraire. Il est obstiné, quand il ne veut pas de quelque chose, il ne se force pas, j'en viendrais même à dire que ce garçon est capricieux, ou du moins sauf avec sa mère. Il est sournois, il en trafiqué, des sales plans pour que je plie bagages, quitte à me blesser psychologiquement ou physiquement. Ce petit n'obéit qu'à sa propre loi, il n'est pas du genre à laisser quelqu'un lui dicter sa conduite. Ça ne changera pas de si tôt, et croyez moi, même si je ne le connais pas à la perfection. Martin McNeil, chauffeur de taxi.

- Heath Crane ? Ouais, j'le connais, c'est un type réglo. Enfin en tout cas, avec moi, y'a jamais eu de crasse ! Si on avait un marché, il le tenait, du genre aucun soupçon sur ce qu'il faisait, parce qu'il tient toujours sa parole. On a eu quatre ou cinq affaires ensemble, et j'peux pas dire qu'on ai beaucoup discuté, mais il n'a pas l'air d'être un menteur. Moi, il m'a jamais menti, sans pour autant me raconter sa vie. De toute façon, je m'en foutais s'il était transexuel, mexicain ou fils à papa. Il a un truc, du genre mystérieux tu vois, il ne dit rien sur ce qu'il a vécu, sur sa famille et tout ça, mais je sais qu'il ne m'a jamais menti, et ces choses-là, j'les sens. Il ne m'a jamais laissé tomber lors d'un deal, c'est pas un lâche, et encore moins une tapette. Il en est même à foncer tête baissée quand on avait un problème dans nos affaires. Alors... si je devais le définir, je dirais que c'est un mec courageux, fidèle, et mystérieux. Léon, dealer de drogues.

- Oh non, ne me parlez surtout pas de ce gros naze ! Je ne veux plus jamais avoir affaire à un mec comme lui ! C'est un escroc, un sale rat, un déchet à l'état pur ! Je l'ai connu y'a environ... un an si je me souviens bien, et on a passé une nuit ensemble. Alors, oui, c'est un beau parleur, il sait comment charmer une fille, il suffit de voir son sourire et se plonger dans ses yeux sombres... mais une fois qu'on y est perdu, on n'en ressort pas indemne ! Et le lendemain de notre nuit ensemble, il avait vidé mon portefeuilles, parti avec au moins cinquante dollars. Alors, oui, c'est un beau salopard, je le déteste... Olivia Carter, étudiante.

- Heath ? Un casse-cou dans toute sa splendeur, je l'ai rarement vu se défiler, pour ne pas dire jamais. Il est capable de tout, même pour s'amuser. A l'école, il me protégeait tout le temps dès que j'avais des ennuis, je savais que je pouvais compter sur lui, ce n'est pas le genre de mec à laisser tomber ses amis facilement, je le sais très attaché à son entourage. Il est drôle quand il veut, il a toujours su me remonter le moral quand ça n'allait pas, quitte à se rendre ridicule, il s'en fiche. Il n'a jamais fais attention à ce qu'on peut dire dans son dos, mais je sais qu'il ne faut jamais le critiquer en face... Du genre, susceptible, y'a pas mieux. Il est violent... enfin, je veux dire, il se sert souvent de ses poings quand il s'agit de se défendre, ou de montrer qu'il ne se laisse pas marcher sur les pieds. Ça ne l'a pas toujours réussit, mais personne n'est parfait, comme on dit... Julian Connors, étudiant.

« J'avais vingt trois ans lorsque Heath est né. J'ai rencontré son père... neuf mois plus tôt, justement. Ça faisait trois ans que je travaillais comme serveuse dans un petit restaurant, mes parents m'ont foutu dehors alors que j'avais à peine dix neuf ans, il fallait absolument que je trouve un moyen de gagner ma vie. C'est à Lewis que j'ai pris un nouveau départ, avec ce job minable, mais ça me permettait de manger et de payer mes factures. C'est donc en février que j'ai rencontré ce type, il est venu manger où je travaillais, et il m'a suivit à la fin de mon service... C'est dans sa voiture qu'il m'a violé, et c'est comme ça que je suis tombée enceinte d'Heath. Je n'ai pas voulu avorter, parce que je ne m'en suis pas rendu compte assez tôt, aujourd'hui je ne regrette pas la naissance de mon fils, c'est un garçon formidable... à sa naissance, j'ai été perdu, je ne savais pas ce que je devais faire, ni comment l'élever. Heureusement, une de mes collègues, qui est aussi ma plus grande amie, m'a aidé. Elle a emménagé avec moi, le temps que le petit grandisse, que je l'inscrive à l'école maternelle. Je ne peux pas dire qu'Heath a été insupportable durant sa petite enfance, il pleurait rarement la nuit, et je suis certaine de lui avoir fournit tout l'amour qu'une mère peut offrir à son enfant. Il est tout ce que j'ai, ma raison de vivre, et malgré le fait que je n'ai jamais connu son père, je lui ai toujours fais comprendre qu'il n'avait pas besoin de quelqu'un d'autre pour le voir grandir. Je n'ai pas pu le gâter, je veux dire, lui offrir des tonnes de jouets, nous ne voyagions pas durant les vacances, il ne voyait pas sa famille... Je suis sa seule famille, la seule personne capable de l'aimer comme jamais. Il ne s'est jamais plaint, il a toujours été un ange avec moi, mais c'était un sacré petit curieux. J'aimais répondre à ses questions innocentes, j'avais vraiment l'impression d'élever mon enfant de cette façon, comme si, c'était moi qui lui apprenait tout sur tout, vous voyez ce que je veux dire ? En grandissant, il s'est forgé un caractère, oh il est bien différent de moi c'est certain, il ne se laissait pas marcher sur les pieds, même petit ! Un brave, mon garçon... A l'école primaire, il m'a rapporté ses querelles avec ses petits camarades, ceux qui cherchaient à le rabaisser sous prétexte qu'il n'avait pas de père. Mais il ne s'était jamais montré faible devant eux, il ne pleurait que dans mes bras, uniquement dans mes bras... »
Elena Crane, sans activité professionnelle.


« Heath a eu une adolescence difficile. Je me suis souvent entretenu avec sa mère, et il a beaucoup changé entre son enfance et ses onze ans. Sa vision des choses étaient différentes, il ne considérait plus ses 'handicaps sociaux' comme des futilités, il voyait gros, et ça lui est monté à la tête. En école élémentaire, ses résultats scolaires étaient plutôt bons, voire excellents, il avait de l'ambition, et montrer que l'absence de son père ne voulait en aucun cas dire qu'il n'était pas comme les autres. Mais en quelques années, tout a changé. Je me souviens qu'il n'avait pas d'amis à proprement parler, il préférait rester seul pendant une période, il m'a dit qu'il ne voyait pas l'intérêt de 'traîner avec des hypocrites'. Je crois qu'il était jaloux de tous ces enfants, ceux qui avaient un père et une mère à la maison, mais il ne l'a jamais dit de vive voix, il se taisait, comme s'il souffrait en silence. Jusqu'à ses treize ans, je ne l'ai jamais entendu, il n'avait aucun problème, il préférait se tapir dans l'ombre et ne pas se faire remarquer, jusqu'à ce que tout ne bascule. Elena, sa mère, venait de trouver un nouveau compagnon, je crois qu'il était chauffeur de taxi, quelque chose comme ça. Et Heath me l'a dit, clairement, qu'il n'aimait pas cet homme, et qu'il avait l'intention de lui rendre la vie impossible. Je crois qu'il souffrait du syndrome d’Œdipe. Généralement ce phénomène ne survint qu'aux enfants de moins de dix ans, mais chez Heath, il s'est attardé. Sa mère lui appartenait, et il ne pouvait pas supporter l'idée qu'un autre homme se l'approprie. A partir de là, il a changé du tout au tout. Son comportement à l'école est devenu agressif, il était vulgaire, moqueur, provocateur... Il s'est attiré des ennuis auprès des camarades, mais suscitait une admiration chez certains. Il s'est créé un cercle d'amis, le genre d'adolescents qui cherchent absolument à se donner des airs supérieurs. Heath s'est mit au racket, aux agressions en série, au vol dans les petites épiceries... Il a été indifférent à toutes nos mises en garde, il ne répondait qu'à sa propre loi. Mais en parallèle, figurez vous qu'il y a eu un paradoxe à tout ça. Bien qu'il séchait la plupart des cours, il assistait à la chorale du collège, il y participait et y mettait du cœur. Il a toujours aimé le chant, ça se sent, et il a été l'élément far de ce club scolaire. Seulement, sa réputation l'empêchait de créer des affinités avec les autres participants, il était encore seul, sans compter ces soi-disant ''voyous'' avec qu'il traînait à longueur de temps. Je l'ai surpris à fumer derrière l'école à plusieurs reprises. Et encore, tout ça, ce n'était rien en comparaison au reste... à quinze ans, son comportement était de plus en plus inquiétant, j'ai eu des échos d'un collègue lorsqu'il est entré au lycée. Il se droguait, il buvait, ses fréquentations étaient de plus en plus inquiétantes... et comme si ça ne suffisait pas, ça blessait sa mère. Lors de l'un de nos rendez-vous, elle m'a expliqué, qu'elle avait l'impression de ne pas avoir été une assez bonne mère pour Heath, qu'elle avait tout gâché. Et cette idée l'a conduite à une forte dépression, elle a tenté de se suicider en ingurgitant des médicaments. Lorsqu'elle s'est retrouvée en hôpital psychiatrique, Heath a quitté Lewis pour Dallas. Je ne sais pas ce qu'il est allé y faire, mais depuis son départ, je ne l'ai plus jamais revu... »
Brian O'Maley, psychologue en collège.


« Si j'me souviens bien, Heath avait dix huit ans quand il est arrivé à Dallas. Mais on ne s'est rencontré que trois mois après son arrivée, j'crois qu'il dormait dans la rue, ou dans des motels pourris. Il avait pas de taff, et comme il m'a abordé, et bah j'lui ai proposé de me donner un coup de main. Je ne lui faisais pas confiance, attention, mais j'pouvais pas vendre ma drogue dans toute la ville tout seul. Alors il m'a aidé, et dès les premiers jours, j'ai su qu'il était réglo. C'est comme ça que j'l'ai connu, et j'ai compris qu'on n'allait pas se lâcher de si tôt. Il est venu habiter dans mon appart, j'lui ai donné la chambre que j'ai jamais utilisé. J'lui donnais 10 % à chaque fois qu'on terminait un deal, il me disait qu'il avait pas besoin de plus pour l'instant, il mettait toujours un peu de fric de côté, j'le remarquais. Mais j'sais qu'aussi, en parallèle, il faisait d'autres trucs, vous voyez, genre il ne bossait pas qu'avec moi. Il me l'a dit, un peu plus tard, et puis il s'faisait raccompagner par des mecs, des vieux souvent, le genre bien fringués costard et tout le toutim. J'vous raconte pas la gueule que j'ai tiré quand il m'a dit qu'il faisait la pute ! Au moins ça rapportait gros, il me donnait toujours un peu de son pognon, et si on ne dépensait pas tout pour se défoncer, on aurait pu s'acheter un manoir à Los Angeles, j'vous l'dis ! Mais on a fait d'autres trucs ensemble, genre braquer des stations services et tout, il était toujours le premier quand on s'battait avec un autre dealer, il a peur de rien ce mec. Il était souvent amoché, mais ça, j'crois qu'il s'en foutait pas mal. Il a jamais ramené une nana à l'appart', il n'en voulait pas j'crois, ou en tout cas il allait se les taper ailleurs que sous mon toit. Il me respectait, franchement, moi, j'l'aime ce mec. Il s'est fait arrêté par les flics plusieurs fois, mais faute de preuves, ils le relâchaient toujours. Puis il m'a jamais balancé, ça, jamais ! J'l'ai jamais vu perdre son sang froid, sauf une fois. On était en pleine baston contre un autre gang, ils nous ont cherché la merde trop longtemps, et on a répliqué. Ça a mal tourné, Heath s'est prit une balle dans l'épaule, BANG ! Il a cru qu'il allait mourir, sur le chemin de l'hosto, j'l'ai vu pleurer, et supplier Dieu. Ça m'a choqué, mais j'avais mal pour lui. Vous m'croyez si j'vous dis que j'en ai chialé ? Arrivé là-bas, il a été soigné à temps, et puis j'sais pas quel crack il a sorti aux toubibs, mais ils n'ont posé aucune question. On a habité trois ans ensemble, et c'est deux mois avant qu'il parte qu'il m'a montré ses économies. Un putain de coffre fort, c'est clair. Il m'a dit que tout cet argent était pour sa mère, quand elle sortirait de l'hosto'. Il a fait tout ça pour sa mère, tout, sans exception. Alors, après son anniversaire, ses 21 ans j'crois, il est parti, il est retourné à Lewis. J'l'ai pas revu, mais j'vais sûrement passer le voir un de ces quatre. Il me manque, ce con. »
Ràmon, dealer de drogues.


« Heath ? Ce gamin a une vie de merde, faut le dire. Il est revenu à Lewis il y a trois ans si je me souviens bien, il a fait du stop jusqu'ici, de Dallas, il voulait rentrer pour voir sa mère. D'ailleurs, c'est bien la première chose qu'il a fait, la revoir. Elle est sorti de l'asile deux mois après son arrivée, et il s'est occupé d'elle pendant tout ce temps, il ne l'a pas lâché d'une semelle. Je crois qu'elle était vraiment contente de le revoir, et elle s'est rendue compte qu'il a sué sang et eau pour elle. Il s'est mit à trouver du travail après ça, et c'est là qu'il est arrivé chez nous, on l'a engagé en tant que serveur. Il n'a jamais eu de problème ici, sage comme gamin, et toujours à l'heure. Il a eu le droit à quelques primes, le patron le trouve sympa, et il fait du bon travail, même si ça demande pas la science infuse. Par contre, je sais qu'en parallèle, il continue de faire le con. La prostitution et tout ça, on dit que ça touche les minettes, mais pas du tout ! J'l'ai vu, lui, monter à plusieurs reprises dans la voiture d'un inconnu, ça me donne des frissons rien que d'en parler, il suffirait qu'il tombe sur un malade et tout est fini pour lui. Pauv' gosse. J'crois qu'il vend de la drogues aussi, j'ai des amies vous savez, elles en voient des choses de leur fenêtre, et Heath avec des types louches, ça se remarque vite. Il a l'air à l'aise, maigrelet comme il est, j'crois qu'il est très confiant dans ce qu'il fait. En tout cas, avec tout cet argent, il peut aider sa mère à bien vivre, elle s'en remet vite de sa dépression, vu qu'elle voit son fiston tous les jours. Mais il a besoin d'aide ce p'tit... si seulement quelqu'un pouvait lui faire comprendre... »
Thelma Gallagher, serveuse dans un 'Diner'.